Poids lourds électriques : bonne ou mauvaise idée ?

À l’heure où les particuliers opèrent une transition vers la voiture électrique, les entreprises spécialisées dans le transport de marchandises sont également invitées à privilégier une mobilité plus écologique. Le choix du poids lourd électrique est-il si intéressant que cela en pratique ? Éléments de réponse.

C’est un fait. En France, en Europe et dans le monde, la circulation des poids lourds constitue l’une des principales sources d’émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. La pollution des poids lourds à moteur thermique engendre par ailleurs des conséquences sanitaires, avec la pollution de l’air (hausse des maladies respiratoires), et des nuisances sonores. En basculant vers un modèle de poids lourd électrique, les désagréments liés à la combustion de carburant s’amenuisent, voire disparaissent. Le poids lourd électrique se veut ainsi plus écologique pour l’environnement, et plus vertueux pour les populations vivant à proximité des grands axes routiers et autoroutiers.

Comparaison avec les véhicules au gaz naturel

Le poids lourd électrique n’est pas la seule alternative au poids lourd à moteur diesel pour lutter contre la production de pollution. Ces dernières années, les gestionnaires de flotte poids lourds sont nombreux à s’orienter vers le GNV (Gaz Naturel Véhicules). En 2023, une étude réalisée par le Conseil international sur le transport propre acte le caractère beaucoup moins polluant du camion ou poids lourd électrique par rapport à son concurrent diesel. Selon cette même étude, le poids lourd électrique pollue également moins que le poids lourd au gaz naturel.

Entreprendre le passage vers une flotte poids lourds électrique est une démarche vertueuse sur le plan écologique. Encore faut-il que cela puisse se faire sur le plan économique. Dans ce domaine, deux données sont importantes :

Sans grande surprise, le coût d’acquisition évoqué ci-dessous constitue encore l’un des principaux freins à la bascule des entreprises spécialisées dans le transport de marchandises vers une flotte électrique. D’autres éléments entrent également en jeu dans la réticence de certaines entreprises à effectuer cette bascule.

L’autonomie des poids lourds électriques

Le poids lourd électrique souffre du même écueil que la voiture électrique avec la question de l’autonomie et de la distance qu’il est possible de parcourir sans avoir à effectuer une recharge de la batterie. Si les constructeurs multiplient les initiatives pour proposer toujours plus d’autonomie, il est encore difficile d’imaginer pouvoir traverser la France au volant d’un poids lourd électrique sans avoir à multiplier les arrêts pour "faire le plein" de la batterie. En moyenne, l’autonomie des camions électriques avoisine les 300 kilomètres.

Les infrastructures de recharge

Directement liée à l’autonomie des véhicules, la question des infrastructures de recharge constitue un autre défi à l’adoption d’une flotte de poids lourds électriques. Pour des raisons pratiques, les entreprises de transport ont tout intérêt à développer leur propre infrastructure de recharge plutôt que de s’appuyer sur les infrastructures publiques. Cela a un coût, qui peut toutefois être en partie financé par les subventions accordées par le programme Advenir. À noter que les entreprises spécialisées dans la gestion des autoroutes investissent également dans ce domaine. De plus en plus de parkings sécurisés poids lourds s’équipent ainsi de bornes de recharge électriques. Se pose par ailleurs la question de la capacité du réseau électrique à pouvoir répondre à une augmentation de la demande d’électricité sur un marché déjà parfois soumis à quelques tensions.

La durabilité et l’impact environnemental des batteries

On le sait, les batteries qui équipent les véhicules électriques (voitures, camions, etc.) ont une durée de vie limitée. De nombreux réfractaires au véhicule électrique soulignent par ailleurs l’impact environnemental des batteries, de l’extraction des matières premières nécessaires à leur fabrication à leur recyclage.

Face aux défis qui attendent les entreprises de transport dans l’adoption d’une flotte électrique (économiques, techniques, etc.), il serait légitime de conserver le statu quo. En pratique pourtant, de nombreux éléments encouragent à la transition vers une mobilité durable.

La réglementation

Un peu partout en France apparaissent les zones à faibles émissions (ZFE). Ces dernières limitent leur accès aux véhicules peu ou pas polluants. Pour les camions amenés à entrer dans ces zones, il est absolument nécessaire de présenter un véhicule qui n’émet pas ou peu de CO2. Rappelons par ailleurs que la réglementation française et européenne tend progressivement à imposer aux entreprises l’électrification de leur flotte avec des quotas de véhicules électriques à respecter.

L’image de marque de l’entreprise

Dans un contexte de réchauffement climatique et de préservation de la planète, une grande majorité des Français est aujourd’hui attentive à l’aspect écologique des activités économiques. Proposer une image de livraison plus "verte" contribue à améliorer son image de marque auprès des consommateurs. Sans tomber dans le greenwashing, la livraison "écologique" constitue un véritable levier marketing pour les professionnels.

Les aides gouvernementales

L’État français et l’Union européenne s’accordent sur la volonté de "verdir" le secteur des transports. Pour accompagner les entreprises dans leur transition énergétique, ils multiplient les aides et dispositifs fiscaux. En France, le plan France Relance adopté en 2020 prévoit par exemple un véritable coup de pouce financier pour l’acquisition d’un véhicule industriel électrique. Toujours dans l’Hexagone, l’Ademe et le programme Advenir accompagnent financièrement les entreprises du transport dans leur volonté de basculer vers une flotte électrique.

Si elle n’est pas exempte de difficultés et de défis à relever, la bascule vers une flotte de poids lourds électriques présente en pratique de nombreux avantages. Encore volontaire, la démarche tend progressivement à être imposée par les instances gouvernementales, à l’échelle nationale et européenne. Mieux vaut donc s’y atteler maintenant pour prendre un coup d’avance.